La profusion de messages publicitaires incite souvent à rechercher des stratégies plus agressives et différenciantes pour affirmer une marque, une entreprise ou un produit sur le marché. On fait appel pour cela à l’efficacité de la publicité. Or quand celle-ci se retrouve noyée dans un flot continu de messages, comment faire ? Faut-il jouer sur le sensuel, l’émotionnel, le sentimental ou les trois à la fois ? Le shockvertising est un choix radical…
Le terme est explicite ! Il s’agit d’associer ce qui est choquant à des concepts publicitaires pour favoriser une mémorisation du message, de la marque ou de l’entreprise promue. Le shockvertising utilise tout ce que la société rejette ou condamne pour rendre les messages publicitaires perceptibles : violence, sexe, drogue, mort, racisme, zoophilie… Provoquer l’audience parce que la technique est efficace dans le processus de mémorisation des messages. Ainsi, du sanguinaire au gore, du barbare au bestial, le but est de choquer pour capter l’attention du public qui va pouvoir retrouver son… sang-froid en passant à l’acte et en consommant, évidemment, le produit vanté par les campagnes de shockvertising.
Voici comment les Suisses ont défini cette technique publicitaire : "Doit être considéré comme shockvertising, toute publicité qui indépendamment des médias employés, utilise des thèmes sans aucune relation objective avec le produit ou la compagnie et capable d’entraîner des réactions violentes de la part des consommateurs dans le but d’améliorer la notoriété de la compagnie."
La référence au sexe est très prisée par le shockvertising. Elle joue sur le glamour et le dénudé léger pour évoquer la sensualité. Elle s’inspire du sado-masochisme ou de la pornographie pour être plus bestiale. Le porno chic et le glam-trash mettant en scène la femme soumise dans certaines publicités pour des produits de luxe sont des exemples parmi tant d’autres. Nous pouvons citer, tout autant, certaines campagnes d’organisations humanitaires ou de santé publique (alcool, cigarettes…) dans lesquelles l’exploitation de l’horreur est une constante.
Le shockvertising s’appuie sur quatre mécanismes qui sollicitent une réaction chez l’audience :
– Le porno-chic ou le glam-trash prônant que le plaisir est lié à la beauté et au sexe
– L’humour, qui déride et qui rend la marque ou l’entreprise sympathique, est facteur de buzz donc d’amplification volontaire du message
– Le trouble qui utilise la violence, la drogue, la mort, le racisme pour provoquer la colère ou la tristesse et faciliter ainsi la mémorisation
– La confusion qui propose un message sans aucun rapport avec ce qui est montré et qui incite l’audience à rechercher un lien donc à mémoriser la publicité
Le shockvertising, nous dira-t-on, n’est qu’une façon détournée de faire vendre ou de faire adhérer à un discours. Mais nous n’avons pas tous un regard de sémiologue ou de marketer sur les messages qui sont diffusés. Comment réagissent les jeunes par rapport à certains visuels ou spots télé ? La violence de certains spots vient s’ajouter au flot de violences continues que nous livrent chaque jour les media d’information.
Le risque est une banalisation et une interprétation de ces messages publicitaires comme des vérités pouvant déboucher sur des formes de violences dans la société. La banalisation du shockvertising peut engendrer des concepts encore plus choquants pour mettre en avant la marque et l’entreprise sur le marché. Mais d’autres possibilités s’offrent aussi aux créatifs à travers des concepts plus décalés, l’humour ou l’exploitation de la beauté du monde… À chacun donc ses sources d’inspiration…
Merci pour cet article qui montre bien qu’il y a encore du boulot pour atteindre le respect de l’Autre.
—
@+
Stéphane Carpentier
ça peut se discuter sur certains aspects.
Je vais me faire l’avocat du diable, c’est un bon client.
Autant le shockvertising pour vendre un produit me sidère, autant pour les campagnes de prévention… Mais jusqu’où alors peut-on aller ? J’ai revu les campagnes pour Amnesty International… Elles ne laissent pas indifférent et créent un véritable malaise.
Mais… Et après ? La violence on la voit tous les jours à la télé, sur le net, au cinéma, chez nos voisins…
Ceux qui sont choqués par ces campagnes, je veux dire réellement, pas ceux qui font semblant, sont ceux qui généralement ne sont pas concernés directement, c’est à dire qu’ils ne sont pas acteur de cette violence par exemple. Pour en revenir à cette campagne, la femme battue. Celui qui frappe sa femme, quelle sera sa réaction face à ces images ? Oh ben je vois que je ne suis pas le seul…
Cette campagne est très bien faite. Lorsqu’on arrête, ils nous incitent à agir. Agir comment ? En rejoignant Amnesty International. Par contre, si on choisit de poursuivre, la réponse est vraiment très bonne. Une très bonne campagne, mais je me demande quel en est réellement l’impact. En fait, elle est faite pour que l’on rejoigne Amnesty International, en nous sensibilisant, heurtant, choquant. Oui faut que ça s’arrête c’est clair. C’est où que je signe ?
Mais en matière de prévention… bon d’accord ce n’était pas le but.
En matière de prévention, la sécurité routière par exemple, la dernière en France penche plus sur l’humour noir. Je pense qu’elle peut être efficace. D’autres, dans les pays anglosaxons, sont largement plus violentes, plus choquantes voire horribles. Je les pense plus efficaces, du moins le temps que ces images nous hantent. Mais les réactions sont intéressantes, certains se sentent réellement concernés, d’autres trop horrifiés et dénoncent ce type de campagne.
J’avais assisté à un colloque sur la communication en matière de santé. Le mot d’ordre était « éthique » donc ne pas jouer sur la peur et les sentiments. Des exemples avaient été montrés de campagnes créés par des jeunes, la cible. L’humour l’a remporté.
Tout ce petit bavardage pour dire que pour une entreprise, utiliser le shockvertising est à ses risques et périls. Risque de voir sa clientèle lui tourner le dos. Quelques clients nouveaux, certainement, mais je ne suis pas sûre que le rapport perte/gain soit positif. L’humour aura toujours la palme ou la beauté, l’émerveillement… Ce qui en plus facilitera et engendrera le buzz.
J’aimerai bien trouver une étude sur l’impact de ces pubs. Avec les commentaires des jeunes et moins jeunes. Leur perception.
Tu réfléchis en tant que personne pouvant prendre suffisamment de recul par rapport aux flots d’image. Tu exerces ton sens critique. Imaginons maintenant des jeunes en cours de se forger une identité… Une étude a dû être faite sur l’impact d’images « violentes » sur les perceptions et les réactions qui en découlent chez les jeunes. Il me semble que les radios en parlaient l’an passé. Ce que notre conscience discerne comme étant une approche conceptuelle et fictive qui ne fait que booster l’image d’une marque ou une identité d’entreprise, es-tu sûre qu’une conscience pas encore mature la prenne avec le même recul ? Le fait est que toutes ces images circulent sur les grands supports et que n’importe qui peut y être confronté… Il y a je pense d’autres moyens et l’humour fait en effet partie d’une approche plus saine.
J’ai bien dit que je me faisais l’avocat du diable ;o)
Je reste persuadée que le shockvertising n’est pas du tout à pratiquer pour les entreprises et la vente de produits ou services. Je m’interrogeais par contre pour les campagnes de prévention. Mais ce n’est pas recommandé en France.
Par contre, oui la perception de ces publicités qui sont plus ou moins choquantes par les jeunes m’intéresse grandement.
Je n’ai en effet pas le même recul face à ces images. J’essaierai de trouver ces études.
Question puisque tu te fais l’avocate du diable : comment une femme peut-elle acheter un produit qui la cible et qui la définit avant tout comme le sexe faible, soumise, belle et dont la beauté n’est qu’une source de plaisir sexuel ?
:o))
Je reprends ce que j’ai dit plus haut.
Le shockvertising est impensable pour un produit.
Pour une campagne de prévention, ça se discute.
Et si tu tiens à ce que je fasse l’avocat jusqu’au bout : Quoi ? Une femme est tellement stupide qu’elle ne verra que l’effet beauté qui attirera à elle l’homme dans toute sa puissance, synonyme du prince charmant tant attendu. Un homme, un vrai, un tatoué.
Et ne me sors pas que je pense ce que je viens de mettre ou je mords ! ;o)